Ecrits de passage

N’être que soi.

Un jour, il le faudra bien. Ça fait quand même pas mal d’années maintenant, que j’en pâtis sans trop m’en rendre compte. Bah oui, j’ai cru à la différence moi. Je me pensais venu du ciel, un peu comme on envoie un fils céleste dans le bec d’une cigogne. Il m’en a fallu du temps pour réaliser que j’en étais bien loin. Je n’irai pas jusqu’à dire que j’étais un raté, mais des ratés, j’en ai commis. À me croire spécial, j’ai un peu gâché ma vie, vous savez. D’ailleurs, je l’ai écrit il y a quelques jours déjà que le désir de perfection, ça en fait du dégât. Je subis encore un peu les dommages collatéraux, il le faut bien si on souhaite vraiment passer à autre chose.

J’ai envie de jouer la carte de la confidence en invitant la vérité à entrer dans la partie. En quelques mots, ça me fait bizarre de le dire tout haut, mais je ne suis qu’un gars comme les autres. Rien de plus, rien de moins, rien d’extravagant, rien de clinquant, je ne suis que moi. Ça fait tout drôle de le dire comme ça. J’ai un petit goût bizarre qui s’invite sur le rebord de mes lèvres, comme si l’exprimer avait fait ressortir quelque chose. C’est spécial comme sentiment, mais ça libère. On en sort grandi, de se voir petit, sans artifices. On a écouté le monder entier autour de nous avec leurs mots tant positifs que négatifs et on s’est créé une vision de nous-mêmes, à croire que l’on n’était pas assez.

C’est un peu de ça que j’ai souffert, de cette impression de ne jamais être assez. Pourtant, des choses, je sais en faire depuis ma plus tendre enfance. J’ai toujours été ce môme curieux, avide de savoir et qui retombe toujours, d’une manière ou d’une autre sur ses pattes. C’est peut-être dû à un instinct de survie. Dans tous les cas, ça n’a pas suffi, il faut croire. Ça doit sûrement venir de l’environnement, d’un sentiment plus profond qui n’a jamais été vraiment exprimé. Je me suis toujours senti un peu de trop, c’est aussi ça l’inconvénient d’être le dernier de la famille.

À l’heure qu’il est, j’ai décidé d’opérer un changement. Comment, me demanderas-tu ? Très simplement, en me pardonnant de n’être que moi. Ça semble facile dit comme ça, mais c’est tout un travail en profondeur. Il faut aller bien bas pour enlever les crasses qu’on a accumulées depuis tout petit. Et puis y aller ça ne suffit pas, il faut éclairer les ombres de notre vie et ça, ça prend du temps. Je ne sais pas trop te dire comment je suis arrivé en m’en débarrasser, mais c’est fait, Dieu merci. Lorsque de telles choses se déroulent dans ta vie, tu es pris d’un sentiment de foi, tu commences à croire en l’Impalpable. C’est fou quand même. On ne se tourne vers le ciel que lorsqu’il nous offre quelque chose. Bonjour chère nature humaine, tu diras être altruiste, mais dans le fond, c’est toujours toi et ton profit que tu cherches même si tu trouveras un tout autre slogan ou mensonge à te raconter. Enfin, je dis ça, mais je ne parle pas de toi en particulier. Ne prends pas mes mots pour un reproche, c’est juste qu’à force de vivre et d’analyser tout ce qu’il m’entoure, j’ai commencé à perdre espoir en l’homme. C’est mon défaut à moi, j’ai préféré me lier avec un chien. Ne te fais pas d’idées, je préfère préciser. C’est comme ma fille, je l’aime sans rien espérer en retour.

Ce qui est fou lorsque tu entreprends de dire aux autres que tu es un gars lambda, curieusement, ils ne veulent pas l’accepter. Ils s’offusquent presque de t’entendre dire une pareille vérité. D’un coup, ils te sortent tout ce qu’ils pensent de toi, le positif uniquement et un peu de négatif pour contre-balancer le bazar. Autrement, on pourrait t’ériger en saint, c’est pour dire. Toi, tu n’en demandais pas autant. Laissez-moi avec mes lubies, je ne vais pas me jeter d’un pont, non, je ne peux pas faire ça. Je n’en ai aucune envie, même si j’y ai déjà pensé quelques fois dans le passé. Heureusement, ce n’est pas quelque chose que je ferai, jamais. Ça serait dommage d’en terminer avec la vie, surtout qu’on nous a toujours dit qu’on n’en a qu’une seule. Tu imagines un peu le truc ? Tu m’es un terme à quelque chose qui est unique, sans prix et infini en possibilité. C’est dommage quand même d’en arriver là, même si j’ai du respect pour ceux qui perdent espoir. La vie peut être tellement moche que parfois, ma foi, on en arrive à désespérer si fort que la seule issue qu’on arrive à voir, c’est la mort.

Je me suis un peu perdu dans mes explications, n’est-ce pas ? Je reviens à mes moutons, désolé pour cette digression. Au fond, les gens ne savent pas ce qu’il se passe à l’intérieur de nous. On est les seuls à connaître nos pensées et toutes les barrières qu’on se crée. Ils ne peuvent pas comprendre ce qu’on veut dire et ce qu’on souhaite lorsqu’on leur déclame que l’on est rien ni personne, simplement un gros bout de viande qui se déplace et qui se prend pour roi. Ils ne savent pas combien ça nous libère de ne plus porter de costumes, d’apparats et prétendre à ce qu’on n’est pas. J’ai prétendu à tant de choses, et je ne sais même pas te dire pourquoi. C’est juste dingue ! J’ai toujours voulu être un autre, me conformer pour correspondre à un idéal. Tu imagines un peu le truc ? On parlait tout à l’heure de ceux qui mettent un terme à leur vie, moi, je l’ai fait, mais pas physiquement, mentalement ! Wow, je viens de me rendre compte de ce que je viens de te dire à l’instant. Toi aussi, tu as eu ce sentiment curieux de toucher à quelque chose de grand ? Dans le fond, on s’est perdu en chemin, on a voulu jouer les grands et le devenir avant l’heure. On s’est permis très peu de fois d’être soi, d’être à nu, d’être faible, d’être vrai. C’est ça qui m’anime aujourd’hui : toucher et exprimer la vérité.

Écoute, je passe même au prochain paragraphe tellement l’idée me stimule. Pourquoi se limiter en revêtant des habits qui ne sont pas les nôtres ? Dis-moi, pourquoi on s’est tant laisser-aller à suivre des chemins qui ne nous correspondaient pas ? Tu vois où je veux en venir ? Il est encore tant, qu’importe l’âge, d’accepter qui on est et d’opérer ce foutu changement en se choisissant qu’importe notre forme, notre regard, notre aspect, nos idées ou nos idéaux. Avec le temps, j’ai appris qu’il n’y avait pas qu’une seule bonne réponse, mais une multitude ! Tout dépend de la manière d’aborder le problème et la vision que l’on porte sur la vie. Au final, ce qui compte, c’est être en phase avec soi-même. De toute manière, on finira quand même seul au bout du chemin. J’ai envie de colorer le monde avec ma vraie couleur, de laisser la mélodie qui chantonne en moi s’exprimer librement, de ne plus retenir cette joie immense qui m’habite. J’ai envie d’une seule et unique chose, être sincèrement en vie. Et pour ça, je suis prêt au plus grand des meurtres, celui de l’image que je m’étais forgée de moi-même. Je n’ai plus honte de n’être que moi, au contraire, je désire l’être pleinement, même si cela m’amène loin, très loin de tout ce que j’étais. 

Écrit le mercredi 06 janvier 2022.

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