Ecrits de passage

Les voies de l’absurde.

Tourner le dos à la monotonie du monde. Fermer les yeux, se boucher les oreilles, laisser le silence prendre place. Avancer à tatillon, sans savoir où tout cela mènera. Tomber, une fois de plus, sans pouvoir se relever. Apprendre de ses erreurs, grandir tout en gardant la même mesure. Se relever sans crier malheur, avancer sans penser au passé. Passer de pas timides à une allure confiante. Se prendre pour le roi du monde sans savoir que ce n’est que le commencement. Avancer sans réfléchir, faire confiance à l’inexprimable. Croire qu’au final, tout fini par prendre sens.

De la marche à la course, il n’y a qu’un pas. Passer le cap, passer la vitesse. Tout s’accélère, pourtant le monde tourne toujours à la même vitesse. Se laisser guider par le néant. Croire au Tout, se laisser berner par les paroles malignes. Prendre confiance, augmenter l’allure. Courir toujours plus, toujours plus vite. Se confronter au vent, à la nature. Se laisser caresser par la brise, par les pétales de fleurs. Croire en l’éternité des choses tout en mourant un peu chaque jour. Ne pas se poser de question. Faire, être, tenter, sublimer. Les yeux fermés: l’enfer aux pieds, le paradis dans la tête. Marcher sur un feu, se brûler sans ressentir la douleur. Flotter sur un nuage, léger comme le vent. Être inspiré, transmettre l’inspiration. Vivre comme un robot. Se croire homme tout en n’étant qu’un meuble. Croire que demain sera promis, comme s’il ne pouvait pas y avoir de fin.

Brûler les ponts, couper les cordes qui retiennent. Ouvrir les yeux, se déboucher les oreilles et crier d’étonnement. Entre le rêve et la réalité, il y a un monde. Entre le ressenti et le réel, il y a une dimension. Pleurer de déception, se réjouir du bruit de tout et de rien. Entendre le chant des oiseaux, le sifflement du vent, le bruissement des rivières, le silence du monde face à sa propre mort. Se prendre pour Dieu, croire être le sauveur. Vouloir le changement, être le chemin. Créer un mouvement, une révolte, créer sa propre mort. Mourir non par fatigue mais par conviction. Affronter la vie en mourant, narguer la mort en vivant.

Voir sans plus aucune lueur, entendre sans plus aucun son, parler sans plus aucun sens. Penser, réfléchir, en ayant perdu toute profondeur. Croire sans avoir la foi. Courir sans jambe et croire en sa victoire future. Inapte à être apte et en être fier. Regarder le monde en s’en écartant. Aimer, loin de tout regard. Apprécier sans caresser. Bénir sans avoir à signer d’autographe. Partager dans l’intention, se rapprocher en gardant les distances. Se parler sans se voir. Faire l’amour sans se dévêtir. Partir à l’aventure sans jamais revenir. Se tuer, pour ne plus jamais avoir à ne plus être soi.

Deuxième texte issu de la série: « Le silence de Glencoe ».

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