Ecrits de passage

Le bouc émissaire.

Ce n’est pas si facile à dire. J’ai le corps qui subit encore les effets indésirables de la tension. Je souffre de frissons, dans ton mon corps. C’est comme lorsque le froid est trop glacial et que les dents claquent sans pouvoir se retenir. La peau, elle, devient si sensible qu’un rien la pousse à la stupeur. Je regrette d’avoir pris tant de risques pour si peu de passion, pour si peu de réconfort. Si tu savais comme je m’en veux, et comme j’ai peur. Aucun mal n’a été fait, c’est vrai, mais en pensée, mon Dieu… J’ai flirté avec les limites et ça, ça me déplaît. Il en faut peu pour tomber, je ne sais pas quelle grâce m’a permis de rester en équilibre.

Lorsque le feu te brûle, tu retrouves immédiatement tes esprits. Tu as l’impression de sortir d’un rêve, d’un cauchemar. C’est fou de prendre conscience qu’on se croit parfois éveillé, pourtant, c’est notre chair qui nous mène par le bout du nez. Comment veux-tu juger les autres après ça, lorsque tu te sais impuissant, malgré ton impression de puissance ? C’est des foutaises tout ça. On n’est vraiment fort que lorsqu’on est faible, c’est là qu’on voit la vraie nature de l’homme, lorsqu’il est éprouvé.

Tout ça pour dire qu’il est si aisé de se perdre, même lorsque l’on pense que tout va bien. L’esprit ne domine pas toujours la matière, et c’est cela qui mène à des dérives. Depuis, j’ai dur à trouver le sommeil, tant de pensées m’accablent. Je déteste avoir à mentir, je suis nul pour ça. Enfin, de mon point de vue, seulement, je ne sais pas ce qu’il en est pour l’autre, s’il arrive à sentir l’odeur d’une fausse vérité. Moi, ce qui est sûr c’est que je préfère dire les choses. Après, tu ne le peux pas en toutes circonstances, toute vérité n’est pas toujours bonne à dire. Il faut être conscient de ce qu’on fait, et surtout des portes que l’on ouvre. Plus que la vérité, c’est le cœur qu’il faut écouter. Pourquoi ouvrir un trou béant et mener à la dérive un bateau qui affronte ses propres vagues ? C’est sadique, et surtout très égocentrique. Agir pour le bien, ça demande parfois d’omettre certaines choses, non pas puisqu’elles sont bonnes, mais puisque le mal fait serait beaucoup plus grand. On appelle ça la loi du moindre mal, être conscient demande d’agir en conscience, avec conscience. Je sais, c’est triste d’avoir à jouer ce jeu-là, surtout lorsqu’on aspire à ne pas être faux, mais on a une responsabilité à tenir et qui apporte une vérité qui n’a pas lieu d’être entendu, prend sur ses épaules le poids de celle-ci. C’est ce qui donne naissance au bouc émissaire.

Le bouc émissaire porte le poids du message qu’il délivre, si ce n’est la destinée qui l’a poussé. Souvent, il est question de le sacrifier, malheureusement… Qui peut prétendre entendre pour sûr les voies du Ciel alors qu’il y monte si rarement ? Agir pour le bien, c’est s’en remettre à plus grand, et le langage d’en haut diffère de celui d’en bas. On a tous une responsabilité dans nos actions, et on souffre, bien que non exprimé, de toutes les choses que l’on fait. L’enfer, il est intérieur avant tout, il est en nous. Tu ne crois pas que l’autre souffre déjà assez ? Pourquoi ne t’en remets-tu pas à la miséricorde divine, pardonnez et vous serez pardonné, en laissant le Ciel décidé lui-même des répercussions ? La foi, c’est cela aussi, croire en la justice, et ne pas imposer la sienne aussi bonne soit-elle selon nous, homme. Lorsque l’on souhaite voir quelque chose retirer, il faut pouvoir le remplacer par un mieux, pour ne pas voir couler le bateau.

Ce foutu sommeil, je ne le trouve toujours pas. J’ai l’impression que le mal ne cesse de se répéter dans ma tête. Comme un hamster coincé à l’intérieur d’une cage, elles défilent, elles défilent, sans s’arrêter, ces pensées que j’aimerais pourtant oublier. Il est déjà tard dans la nuit, ou bien tôt dans le jour, je ne sais plus. Je suis couché, les bras le long du corps, le regard dans le vide. Tout ce mal aurait pu être si facilement évité, pourquoi me suis-je laissé entraîner par mes bêtises et mes faiblesses ? C’est donc cela être homme, apprendre par le feu à devenir lumière.

Écrit le 16 février 2022.

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