Différent.

Tout comme vous, je suis un être de la terre. Je chevauche ce sol qui jadis a vu mes aïeux naître. Je ne sais pas d’où je viens ni la raison même de ma présence. Ma vie est simple, elle se déroule dans l’éternel présent, en symbiose avec ce qui m’entoure.

Je vous vois au loin tenter de maîtriser tout ce qui s’approche de votre vue. Vous agissez comme si la terre vous appartenait, comme si vous étiez seul en ce monde. A vos yeux, je ne suis qu’un animal, un être fort différent de vous. Ma vie n’a pas de réelle valeur. Mon corps et mes cornes, elles, vous intéressent. Je ne suis rien d’autre qu’un trophée ou un morceau de viande convertible en pièce d’or. La différence pousserait-elle donc à l’indifférence?

Parlons de différence, qu’ai-je donc de si différent de vous? Nous sommes issus du même sol, de la même terre mère, du même Père. Nos apparences diffèrent peut-être mais tout comme vous je me déplace à l’aide de mes pattes. Je m’abreuve et me nourris de la même manière que vous. Je ne porte peut-être pas le même pelage et ne me déplace pas de la même manière mais cela fait-il de moi un être à ne pas respecter?

Cela fait un temps que le monde me semble fort différent. L’unité n’est plus ce qu’elle était, la division règne désormais. La compassion semble avoir disparue de ce monde. Je ne sais plus si je peux me fier à vous, vous nous nourrissez pour mieux nous apprécier. Le monde qui est le vôtre tente de nous extraire, de nous faire quitter sa terre. Moi qui erre depuis la nuit des temps, j’ai l’impression d’être de trop. Je vois et je ressens que beaucoup de mes semblables s’éteignent éteignant avec eux une espèce entière. L’avidité a raison d’être là où l’argent est roi mais si la terre se meurt, à quoi bon être celui qui porte la couronne? A trop vouloir être roi, on finit sans cour. Telles des bêtes, vous nous persécutez agissant comme des animaux. Au final, peut-être est-ce vous qui êtes de trop.

Quinzième texte issu de la série: « Le silence de Glencoe ».

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