Ecrits de passage

Dans ma caravane.

Dans ma caravane, rien n’est plus pareil. Les meubles qui jadis meublaient notre résidence volent en éclat. Ce qui auparavant revêtait du sens, a perdu toute raison d’être. Seul le silence et le vide arrivent à se glisser entre les débris. Toute notion du temps a disparu. Les secondes se transforment en heure, les heures en jours et les jours en un éternel recommencement. Comme après un réveil suite à une longue agonie, l’avenir semble lourd à porter.

Dans cette caravane, le monde nous appartenait. A quoi bon se contenter de l’ordinaire lorsque l’extraordinaire est accessible? Au milieu de nulle part et près de tout, nous avions plié bagages. Au milieu de la nature, nous y étions cachés. Tout ce que nous souhaitions, nous l’avions. Nos corps ne se quittaient plus. Un nouveau monde s’est ouvert à nous, un monde où nous étions rois. Jeune et inexpérimenté, pourquoi se refuser à l’expérience?

Au volant de cette caravane, je naviguais les yeux fermés sans chercher à voir plus loin que le bout de mon nez. J’ai cru le monde similaire à ma personne, j’ai cru en l’Homme. Le brouillard a fini par se dissiper, mon Être a fini par émerger. Petit à petit, la brume a disparu laissant apparaître l’étendue du spectacle dont j’étais le pion. Il n’est jamais aisé de regarder le miroir droit dans les yeux, il est encore plus dur de parcourir une route qui mène à l’oubli.

Ma mémoire se moque de moi, elle me joue des tours. Elle me rappelle une période où l’illusion était reine et qui, aujourd’hui, est révolue. Elle me conte des histoires qui jadis me rendaient heureux et qui aujourd’hui me tranchent le coeur. Même si la douleur ne m’atteint plus, je fais face à la désillusion. Il est vrai que face à la réalité, ma faiblesse a pris le dessus me laissant, gésir, seul, loin de toute présence humaine, dans une flaque de larmes.

Mon coeur n’est plus comme avant. Son pou s’est arrêté. Vidé, il ne sait plus que faire. La folie l’a atteint et je ne sais s’il retrouvera un jour la raison. La vérité finit toujours par pointer le bout de son nez, ce n’est bien souvent qu’une question de temps. D’ailleurs, le vent a fini par tourner, le destin a fini par changer de camps. Malheureusement, ce qui était n’est plus.

L’horloge tourne et mon âme se dessèche. La patience est une vertu mais vient un temps où l’attente tue. Je suis assis au milieu de ce que nous avons construit. Mes yeux sont grands ouverts. La réalité s’impose à moi, elle se dévoile. Mes larmes ont fini par sécher, mon coeur a fini par trouver raison. Je ne peux rester indéfiniment dans le noir lorsque mon être me pousse vers la lumière.

Seizième texte issu de la série: « Le silence de Glencoe ».

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