Ecrits de passage

Avant la fin.

Au loin, j’entends le bateau arrivé. Son mouvement sur la mer amène des vagues jusqu’au rebord du quai. Du haut de mon appartement, je vois la bâtisse amarrer.

Pour un mois d’octobre, le temps se montre clément. Un timide soleil éclaire la journée. Le clocher vient de sonner dix heures et trente. Une bonne heure pour débarquer.

De chez moi, j’observe les passages qui, en toute hâte, s’arment de leurs bagages, de leurs documents et s’en vont, promptement, sûrement impatients de toucher terre et de respirer l’air de la ville.

Pour moi, cet événement n’est pas anodin. J’ai le cœur qui bat à la chamade en observant ce spectacle pourtant si ordinaire. Mon regard se porte sur toutes les dames seules avec l’intime espoir d’entrevoir celle qui fait chavirer mon cœur.

Ô, je le sais. Je n’ai point conjugué ce verbe au passé. Pensez-vous qu’une séparation suffit à faire disparaître tout sentiment ? Sachez que non. Il est bien trop tôt pour oser parler de la sorte. Je me réserve encore ce déplaisir d’espérer un quelconque changement. Une incompréhension est si vite arrivée voyez-vous. Est-ce mal de continuer à aimer tout en gardant la distance ?

Enfin, mon attente finit par porter ses fruits. Elle apparaît, timidement. Soudainement, elle explose de joie et perd cette timide allure à la vue de ses êtres chers. Elle crie, elle pleure, elle saute de joie. Une myriade d’émotions semble s’exprimer sur son visage et tout au travers de son corps. Quel beau spectacle, il met du baume au cœur même si la tristesse nous habite. D’ailleurs, mon cœur se remplit de joie de la voir empreinte de tant de vie. Je regrette, simplement, de ne point être là, parmi eux, auprès d’elle.

De but en blanc, elle s’en va en compagnie de sa famille et des amis qui sont venus l’accueillir. Tout cela s’est passé si vite, aussi vite que la durée de vie qu’une ombre qui nous accompagne. Un goût amer accompagné d’une certaine lourdeur s’empare de moi. Moi qui pourtant, suis si peu expressif, fonds en larmes jusqu’à me retrouver assis entre mes genoux, sur le sol froid de mon modeste appartement. Les rayons du soleil pénètrent allègrement mon chez-moi, mais il n’en est pas autant pour moi.

Foutue tristesse. Cesse donc de t’emparer de moi. Il est vrai, j’aimerais trouver un moyen de régler le malentendu, mais comment faire ? En moi, je sens que cette distance n’est qu’éphémère, que plus nous est promis. Il me plairait tant d’enfin se voir et de se mettre à nu. N’associez point de pensées salaces à cette expression. Je parle de se livrer totalement avec les mots et le cœur comme porte-parole.

En dehors des mots et de la raison, il y a le ressenti et les actions. Les mots peuvent dire une chose, et le cœur une tout autre. Le corps être froid alors que les yeux brillent de mille feux. La situation peut sembler insurmontable et les corps, rapprochés, se sentir inséparables. Le réel l’emporte toujours sur le virtuel. Il révèle ce que nous ne pouvons, nous-mêmes, voir.

Alors, je cesse d’attendre et agis. Je me mouille. Je me relève enfin, saute de cette foutue fenêtre et cours. Je m’empresse d’aller la retrouver. À quoi bon attendre alors que le temps vienne toujours à manquer ? Je cours à m’en essouffler et si je puis vous demander une faveur, auriez-vous l’obligeance de joindre vos mains avec les miennes et prier pour que je trouve le bon chemin ?

Ecrit le lundi 18 octobre 2021.

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