À l’essence ciel.

Paysan d’héritage, que sommes-nous devenus maintenant que nos pères ne sont plus ? La mondialisation nous a transformés comme elle a transformé notre monde altérant même notre manière de fonctionner. Les filaments qui nous maintenaient reliés à nos pères ont été brisés, rompus. L’évolution tant plébiscitée a fait de nous des produits, des consommateurs écartés de toute capacité d’user pleinement de leurs capacités. 

Retour à la terre, retour à la création. Dépossédé, de tous ces biens qui nous possèdent, un vent de liberté nous propulse vers d’autres sphères. Il est enfin possible de voir au-delà des montagnes fictives qui ont été dressées pour que nous ne puissions voir. Loin de toute habitation, de toute civilisation, une nouvelle page, vierge, sincère et pure peut s’écrire.

Qu’est-ce que la liberté pour un prisonnier ? Une peur à affronter, un monde à conquérir, des ténèbres à éclairer. Elle est une bouffée d’air frais, le parfum suave d’une fleur que l’on pensait, à tort, inaccessible. Le corps se relâche, un bien-être nous envahit, un calme jamais ressenti encore s’empare de nous. Le temps s’efface, on le savoure sans chercher à courir après. La simplicité s’impose : à quoi bon toujours désirer lorsque le bonheur est à nos pieds ? 

Soudain, on réalise que tout était vicié. Que jusqu’ici, jamais, nous n’avions été libres. Libre de consommer, d’agir en un sens, libre de se déplacer dans un périmètre délimité. Comment avons-nous pu croire que le monde se limitait aux images et aux désirs que l’on souhaitait bien nous proposer ? Comment un si grand nombre peut-il être sous le joug d’un si petit ?

Paysan libre, propriétaire de sa propre terre. Terre d’héritage, terre de ses pères que l’on chérit à l’image d’une mère. Elle, sans cesse, nous rend au centuple nos actions. Abreuvée d’amour, elle nous offre son meilleur. Oubliée, elle se laisse mourir n’offrant que ses ronces comme présent. D’elle dépendra l’avenir de ceux à venir. Quelle folie que d’agir uniquement pour soi et son temps lorsque les lendemains sont plus importants.

Qui a les yeux pour voir ne peut rester insensible. Je vois une richesse énorme, une richesse sans prix où faune et flore cohabitent en symbiose s’embellissant mutuellement, main dans la main. Loin de la cupidité et des mains avides des hommes, elle s’épanouit et dévoile ses charmes à tous qu’importe leur origine, leur race.

Le silence se remplit de mélodies. J’entends, comme un chant, l’eau qui coule goutte à goutte au loin, celle qui ruisselle se purifiant naturellement, celle, immobile, qui regorge d’habitants invisibles, celle qui se déplace imperceptiblement dans l’air et qui se mêle au vent. Enfin, je sens celle qui bouillonne en moi, chanter, danser, heureuse d’avoir enfin retrouvé ses frères et ses sœurs unifiés.

Ecrit le 13 mars 2018, réécrit le 13 juillet 2021.

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